La planification des effectifs dans les centres de contacts est un défi complexe et en constante évolution. Les erreurs de planification peuvent avoir des conséquences importantes sur les coûts, la qualité du service et la satisfaction des agents. Dans cet article, nous explorerons huit erreurs de planification courantes et comment les éviter.
Un grand merci à to Conduent, Allclear Insurance et à tous les autres contibuteurs quant à leur participation pour cet article.
La plupart des modèles de planification des agents fonctionnent avec des horaires fixes et des rotations simples. Par exemple, une première semaine avec des horaires en matinée, la semaine qui suit avec des horaires en milieu de la journée, puis enfin une semaine avec des horaires en fin de journée, et ce, en boucle.
Les horaires fixes peuvent être facilement gérés à l'aide de tableurs. De plus, les agents apprécient généralement de savoir précisément leurs horaires plusieurs mois en amont — c’est pourquoi dans certains centres, la planification avec des horaires flexibles n’est pas exploitée. En réalité, adapter les horaires en fonction de la demande peut s’avérer bien plus intéressante.
Avec le besoin de rationaliser les horaires, de minimiser les coûts et de satisfaire les clients, plus vous avez de flexibilité, mieux c'est. Dans de nombreux centres, les contrats des agents incluent la possibilité de varier les heures de début et de fin afin d'optimiser les heures de travail de chaque agent.
Pourtant, les planificateurs et les gestionnaires hésitent parfois à le faire. La planification flexible vous permet d'aligner la "demande" (charge de travail) avec l'"offre" (agents en place) aussi parfaitement que possible, car elle permet une attribution plus granulaire des heures de début, de fin et de pause. Voici un exemple : La période de 09h00 à 09h15 est en sureffectif et l'intervalle de 15 minutes suivant est en sous-effectif. Simplement en retardant l'heure de début d'un agent de 15 minutes, on améliore l'efficacité de la planification et on se rapproche des objectifs de niveau de service dans deux intervalles. Ne pas exploiter la flexibilité, c'est passer à côté d’opportunités.
René Nijman, responsable mondial de la planification des ressources et de la gestion des effectifs chez Conduent, un acteur international majeur du marché de l'externalisation des centres de contact, le dit ainsi : "Je suis perplexe de voir que des centres d'appels travaillent encore avec des horaires fixes. Pourtant, beaucoup disposent d'une solution de gestion des effectifs — mais ils se donnent la peine de l'utiliser pleinement. Nos clients s'attendent à ce que nous offrions une efficacité maximale. Ajuster sa planification est l'une des clés pour optimiser les performances. De plus, pensez à ceci : les agents ont aussi des contraintes personnelles et elle n'est pas toujours à horaire fixe. Beaucoup d'agents apprécient volontiers de petits ajustements au sein de leur emploi du temps."
Le shrinkage correspond au temps où les agents ne sont pas disponibles pour gérer les demandes de contacts. Cela inclut les pauses, les réunions, les séances de formation, et les 1:1, ainsi que le temps hors du bureau pour les vacances, la maladie, les retards, et les absences inexpliquées en général.
Le shrinkage est une donnée clé, car elle joue un rôle important dans le nombre de personnes qui devront être planifiées par intervalle. Si vous ne la prenez pas en compte lors du calcul du nombre de personnes à planifier, vous serez toujours en sous-effectif.
Pour calculer le shrinkage, vous pouvez extraire les rapports de présence au sein de votre solution de WFM maisl y a cependant quelques pièges à éviter.
La plupart des centres de contacts connaissent des pics et des creux de charge de travail tout au long de la journée. Un exemple classique est la "courbe en M" qui correspond à un pic le matin et un autre l'après-midi, avec une baisse entre les deux pour le déjeuner. Mais si tous vos agents travaillent à temps plein, éliminer les sureffectifs et les sous-effectifs sera toujours un défi.
Un pic de quatre heures ne peut pas être résolu en modulant les plannings tandis qu’embaucher davantage d’ETP peut entraîner des sureffectifs. Il est utile de pouvoir planifier les pauses pendant les périodes de creux, mais cela ne résoudra probablement pas complètement le problème. Les horaires fractionnés peuvent être utiles, mais ne sont pas plébiscités par les agents.
Il est tentant d'embaucher des employés à temps plein. La planification est plus facile avec des horaires de travail unifiés, par exemple 8 heures/jour, 5 jours/semaine. Cependant, il peut être nécessaire d’embaucher des travailleurs à temps partiel. Les travailleurs à temps partiel facilitent la couverture des heures de pointe, ouvrant la voie à une meilleure adéquation de la charge de travail. Ils n'ont pas besoin de pause déjeuner.
Il existe ainsi des outils et des techniques pour faciliter la planification des travailleurs à temps partiel. N'oubliez pas que tous les agents ne cherchent pas un travail à temps plein. Les parents, les étudiants et les soignants préfèrent travailler à temps partiel, car cela leur donne l'équilibre travail/vie dont ils ont besoin.
Bien que la répartition entre les employés à temps plein et ceux à temps partiel varie selon le centre de contact, il est fréquent de constater un quart des effectifs à temps partiel.
René Nijman de Conduent ajoute : "Le temps partiel ne concerne pas seulement le nombre d'heures par semaine mais bien le nombre de quarts de travail “à temps partiel” que vous pourrez planifier. Par exemple, 36 heures / 5 jours peuvent être planifiées comme 4x8h + 1x4h, tandis que 16 heures / 2 jours sont probablement planifiées comme 2x8h et contribuent donc moins au ratio de quarts de travail à temps partiel. Bien que vous deviez calculer le nombre requis de quarts de travail à temps partiel par programme (client), une règle d'or est de 20-25% de quarts de travail de 4 heures."
Même si votre contexte contractuel ne vous autorise pas à adopter des horaires entièrement flexibles avec des heures de début et de fin ajustables, il est crucial de prévoir des moments de pause. Cette simple initiative peut booster l'efficacité et le niveau de service, et cela s'avère souvent moins contraignant sur le plan contractuel.
Si vos agents prennent actuellement des pauses à leur gré et que certains collègues ont tendance à déjeuner ensemble, une évolution de la culture d'entreprise est nécessaire. Vous pourriez avoir à proposer une contrepartie pour la mise en place de pauses planifiées. Cela ne signifie pas forcément une compensation financière. Cela pourrait se traduire par la mise à disposition d'un portail en libre-service où les agents peuvent poser des jours ou échanger leurs créneaux horaires. Ces options sont très appréciées, surtout lorsqu'elles sont accessibles via smartphone.
Comme l'exprime Howard Stephens, responsable des ressources et de la planification chez AllClear Insurance : "Nous organisons toutes nos pauses, essentiellement car cela nous permet de mieux répartir les heures de déjeuner, garantissant ainsi une couverture optimale lors des pics d'activité. "
Une solution de WFM de qualité planifiera automatiquement les pauses au moment le plus opportun, minimisant ainsi l'impact sur la disponibilité et le niveau de service. Les pauses, bien que pouvant sembler aléatoires à première vue, sont stratégiquement positionnées. Scott Moss, planificateur chevronné, conseille : "Ne cherchez pas à avoir la main les pauses que le logiciel insère. Laissez l'outil faire ses propres optimisations !"
Les centres de contacts regorgent de données. De nombreux rapports et indicateurs de performance sont disponibles, tels que le niveau de service, la résolution au premier appel, le nombre d'appels traités, le nombre d'appels abandonnés ou encore le taux d'occupation des agents.
Il est donc important de mesurer l'efficacité de la planification comme un indicateur clé, car elle influence la plupart des autres indicateurs. Cela signifie donc mesurer la concordance entre le nombre d'agents présents et le nombre nécessaire sur une période donnée. Les écarts entre les prévisions et les besoins réels doivent être évalués régulièrement et synthétisés, que ce soit hebdomadairement ou mensuellement.
Votre outil de gestion des effectifs doit nécessairement afficher cette donnée. Lors de la consolidation des données, utilisez des moyennes pondérées. Par exemple, une couverture de 50% est bien plus problématique lors d'une période avec 100 appels que lors d'une avec 10 appels.
N'oubliez pas non plus d'exclure les périodes hors horaires d'ouverture. Atteindre une efficacité de 100% est utopique. D'où l'importance de surveiller régulièrement la planification et de la comparer dans le temps, idéalement avec d'autres entreprises du même secteur. René Nijman de Conduent ajoute : "L'efficacité de la planification est une métrique que la COPC intègre dans son Tableau F. Outre cet indicateur, le Tableau F de COPC comprend d'autres mesures pertinentes pour optimiser au mieux la gestion des effectifs."
Erreur n°6 : Vouloir réduire à tout prix les heures supplémentaires
Bien gérer la planification de votre équipe signifie obtenir des prévisions précises et organiser les horaires de vos agents de manière efficacace, rendant ainsi les heures supplémentaires superflues. Cependant, il arrive que des quarts de travail optimaux, évitant tout sur-effectif ou sous-effectif, nécessitent que certains collaborateurs fassent des heures supplémentaires. Mais les heures supplémentaires, c'est coûteux et intrinsèquement néfaste, n'est-ce pas ? Pas forcément.
Le coût horaire, charges comprises, est défini par le salaire de base additionné aux frais généraux. Bien que les heures supplémentaires soient majorées, elles n'engendrent pas de frais supplémentaires, déjà couverts en temps normal. À l'inverse, des plannings conduisant à des sur-effectifs signifient que des agents sont rémunérés sans apporter de réelle valeur. Des études ont démontré que le temps d'inactivité coûte bien plus que les heures supplémentaires. L'usage excessif des heures supplémentaires peut indiquer une planification défaillante, mais elles ne devraient pas être écartées par principe.
René Nijman de Conduent souligne : "Les heures supplémentaires doivent être utilisées judicieusement. Elles sont souvent une solution mal exploitée pour augmenter la flexibilité. Un recours systématique aux heures supplémentaires indique un manque de ressources ou une inadéquation avec vos besoins. Les heures supplémentaires ne traitent pas le problème à la source. De plus, si vous y avez recours, surveillez vos indicateurs comme l'absentéisme et le respect des horaires. Vous ne souhaitez pas instaurer une culture où il est possible d'être absent le matin et de bénéficier d'heures majorées le soir."
Il est courant de penser qu'il sera difficile de pourvoir des quarts de travail en dehors des horaires classiques, tels que les soirées, week-ends ou jours fériés. Cependant, si de nombreux agents préfèrent avoir des activités personnelles durant ces créneaux, ce n'est pas le cas de tous. Il est préférable de ne pas faire de suppositions hâtives.
En réalité, certains apprécient ces horaires décalés. Par exemple, des étudiants peuvent préférer travailler en soirée ou le week-end pour financer leurs études. Souvent, ces horaires décalés correspondent à des périodes de moindre affluence, rendant le défi plus gérable si quelques agents acceptent ces quarts.
Il n'est jamais judicieux de simplement espérer que tout se passera bien. Voici le témoignage d'un planificateur d'un grand centre de contacts américain, souhaitant garder l'anonymat : "Face à des démissions plus importantes que prévues et à l'approche de la haute saison, nous étions constamment en sous-effectif. En parallèle côté récrutement, la formation de nouveaux employés nécessite du temps. Nous avons choisi de persévérer sans embaucher, pensant ainsi éviter les coûts associés et le risque de devoir licencier ces nouveaux venus à la fin de la saison. J'ai suggéré de garder des agents moins performants pour équilibrer les effectifs. C'était une grave erreur. Ces agents ont donné le mauvais exemple, incitant leurs collègues à arriver en retard, à prolonger leurs pauses, etc. Tout cela a aggravé le problème de sous-effectif au lieu de le résoudre."
La leçon à retenir : rien ne remplace une bonne planification pour pouvoir prendre les bonnes décisions.