À chaque cycle de WFM, les équipes de planification compétentes savent qu’il est nécessaire d’analyser la situation et de fournir un rapport sur ce qui s’est déroulé – ou non – comme prévu. Idéalement, chaque cycle doit permettre, entre autres, d’améliorer l’expérience client, et d’optimiser la planification et la charge de travail des agents. Pour atteindre ces objectifs, l’équipe doit prendre en compte différents facteurs tels que la précision des prévisions, la pertinence de la planification et l’implication des agents.
Certaines équipes considèrent le reporting comme une tâche administrative totalement ingrate. Il n’en est rien. L'objectif des analyses et du reporting est d’améliorer en permanence l’efficacité de la planification afin de permettre à l’entreprise d'atteindre ses objectifs opérationnels. C’est grâce au reporting que les équipes de planification peuvent apprendre de leurs erreurs et ainsi développer une culture de la réussite.
Un reporting efficace nécessite de solides compétences mathématiques et statistiques. Il faut notamment savoir qu’on ne doit jamais faire une moyenne de moyenne. Le choix de l'intervalle d'évaluation est également important : il peut, par exemple, être nécessaire d’évaluer la précision des prévisions au niveau horaire pour ne pas risquer de masquer des variations intrajournalières.
En partant du principe que les lecteurs maîtrisent les notions mathématiques qui régissent les centres de contact, nous allons passer en revue dans cet article certaines erreurs stratégiques et découvrir comment les éviter.
Il peut arriver que des données nécessaires au reporting soient difficilement accessibles. Il est alors tentant de faire l'impasse sur ces données pertinentes au profit d'informations plus faciles à obtenir. Même dans une organisation en silos, c’est justement le rôle de l’équipe de planification de consolider des données provenant de sources diverses afin de générer un rapport complet, pertinent et exploitable. Ce sera bien sûr plus facile si les systèmes qui contiennent les données d’origine permettent l’extraction de celles-ci. C’est pourquoi les meilleurs systèmes de WFM incluent généralement une API qui permet d’importer facilement des données dans n’importe quel outil de reporting, qu’il s’agisse d’une feuille de calcul ou d’un outil de Business Intelligence.
Idéalement, les KPI (Key Performance Indicators, indicateurs clés de performance) d'un processus de WFM doivent refléter la stratégie et les objectifs opérationnels de l’entreprise. Mais, dans les faits, de nombreux centres de contact utilisent des KPI génériques. Analysons certains de ces indicateurs pour comprendre en quoi ils ne sont pas toujours pertinents.
Il est évident que, pour qu'un processus de planification soit efficace, il doit reposer sur des prévisions précises. On vise souvent une précision de 95 %, sans que ce nombre soit pour autant basé sur des données rationnelles. Or la meilleure prévision n’est pas forcément la plus précise, mais plutôt celle qui permet d'obtenir de bons résultats. Même avec une précision de 100 %, une prévision est inutile si personne n’en tient compte. Une prévision avec 80 % de précision mais ayant permis de prendre des décisions éclairées sera bien plus utile. Comme l’explique Ian Robertson, de The Forum, « La précision d’une prévision ne détermine pas ses chances de réalisation, elle donne simplement une idée du niveau de flexibilité à prévoir. ».
L'intérêt des prévisions est de permettre la création de plannings destinés à répondre à la demande en temps réel. Pour ce faire, il est nécessaire de moduler les effectifs, ce qui incombe à l’équipe des opérations plutôt qu’à l’équipe de planification. Selon Simon Waldron, d’injixo, « l'équipe des opérations doit se poser certaines questions » :
Le shrinkage est le pourcentage de temps rémunéré pendant lequel les agents ne sont pas disponibles pour gérer des contacts. Plus concrètement, il s'agit de périodes non productives telles que les pauses, les réunions, les formations, les entretiens individuels, ainsi que les absences pour cause de congés ou de maladie, les retards et autres absences non justifiées.
Le shrinkage est-il forcément une mauvaise chose ? Au premier abord, on peut penser qu’en réduisant le shrinkage, on améliore automatiquement la productivité, ce qui permet d’augmenter la probabilité d'atteindre les objectifs fixés. En minimisant le shrinkage, il est en effet possible de gérer plus d'appels et d’offrir une meilleure qualité de service sans avoir à recruter de nouveaux agents. L'équation semble évidente.
Simon Waldron nous rappelle toutefois qu’il n’est pas toujours anodin de vouloir réduire le shrinkage :
Si le shrinkage peut engendrer certains problèmes, il ne doit pas pour autant faire l’objet d'une chasse aux sorcières. Tout comme l’obsession des heures supplémentaires, il s'agit pourtant d’une erreur courante en matière de WFM.
La qualité de service (QS) est une métrique que presque tous les centres de contact utilisent pour mesurer leurs performances. Pour la plupart d’entre eux, il s'agit d’une donnée qui doit impérativement être intégrée au reporting. Toutefois, Ian Robertson a révélé qu’il n’existe pas forcément de corrélation entre la satisfaction client et la qualité de service. Selon plusieurs membres de The Forum, tant qu’un appel est correctement et rapidement pris en charge (en 10 minutes maximum), l'impact du temps d'attente sur la satisfaction client est quasiment nul. Le respect de la qualité de service n’est pas nécessairement gage de qualité ou d’expérience client réussie. C’est même parfois l'inverse : certains objectifs de qualité de service peuvent encourager des comportements indésirables, par exemple une communication trop directe vis-à-vis des clients.
De nombreux centres de contact ont pour objectif de répondre à 80 % des appels sous 20 secondes, sans pour autant comprendre d'où viennent ces métriques. En réalité, ces chiffres ne reposent sur aucune donnée scientifique. Ils remontent au début des centres d'appel américains, lorsqu’il fallait attendre 20 secondes pour entendre 3 sonneries de téléphone. Le chiffre de 80 % est quant à lui dérivé du principe de Pareto. Il est bien plus productif pour un centre de contact de définir un objectif de qualité de service adapté à son secteur d'activité. Par exemple, 20 secondes est un délai trop long pour des services d’urgence. Inversement, dans de nombreux autres cas, il est totalement acceptable de dépasser cette durée. Dans tous les cas, il faut savoir que plus l'objectif de qualité de service est élevé, plus il nécessitera d’investissements financiers et humains.
Lorsque l’on se fixe un objectif, on n’en anticipe pas toujours les conséquences. Comme l’explique Ian Robertson : « Pris indépendamment, tout objectif est facilement atteignable. » On peut atteindre ses objectifs de productivité sans fournir un bon service. On peut atteindre ses objectifs de qualité en ne fixant pas de limite de temps d’appel, ou réduire ses coûts jusqu’à perdre tous ses clients ou à épuiser ses agents qui finiront par démissionner. On peut même atteindre ses objectifs de qualité de service en reléguant à la fin de la liste d'attente tous les appels qui n’entrent pas dans le cadre de ces objectifs. Dans tous ces cas, le but premier est atteint mais on a totalement négligé la vision globale.
Dans ce contexte, il peut être utile de faire appel à la méthode du tableau de bord prospectif. Puisque le processus de WFM implique plusieurs types d’intervenants, il est pertinent de définir des KPI différents pour chaque catégorie :
D’après Ian Robertson, « Il faut choisir des KPI qui évaluent dans quelle mesure l’entreprise parvient à mettre en œuvre sa stratégie opérationnelle. » Cette stratégie se définit au travers des éléments suivants :
Rien n’est permanent, sauf le changement. Si cette citation peut sembler abstraite, elle soulève une caractéristique essentielle des analyses et du reporting WFM. La plupart des entreprises lancent régulièrement de nouveaux produits et s'adressent à différentes cibles ayant des attentes variables. Certains canaux de communication se développent tandis que d'autres s’essoufflent. Les centres de contact ne peuvent pas ignorer l’impact de certains événements extérieurs (tels que la crise financière de 2007 ou, plus récemment, la pandémie de COVID-19) sur les attentes de leurs clients et leurs impératifs opérationnels. Comme nous le rappelle Simon Waldron : « Début 2020, alors que la pandémie explosait, de nombreuses entreprises ont estimé qu'il était utopique de continuer à se concentrer sur la qualité de service et la précision des prévisions. Il devenait nécessaire de s’orienter vers d'autres priorités, telles que le taux de réponse et celui de résolution au premier appel. »
Les KPI ne doivent en aucun cas être statiques. Il est même recommandé de les passer régulièrement en revue dans le cadre du cycle annuel de planification de l’entreprise.
Ian Robertson cite le psychologue George Armitage Miller, célèbre pour son article intitulé Le nombre magique sept, plus ou moins deux, où il explique que, chez l’Homme, la mémoire de travail peut habituellement retenir sept faits au maximum. Or certains centres de contact prétendent suivre des dizaines de KPI. Non seulement cette stratégie contredit la théorie de Miller, mais elle est également inefficace, démotivante et contre-productive. En effet, lorsqu'une personne se rend compte qu’elle ne pourra pas atteindre tous ses KPI, elle va avoir tendance à se concentrer sur les plus simples à atteindre au détriment des plus complexes, sans se demander lesquels sont les plus importants.
C’est pourtant la définition même des KPI : des indicateurs clés de performance. Il s'agit de mesures stratégiques que les équipes de direction doivent s’efforcer de suivre attentivement. Il est également utile de disposer de données de performance opérationnelle, mais il ne faut pas confondre les deux types de mesure. Il est illusoire de penser que les équipes de direction pourront tenir compte de chaque indicateur, même minime, lorsqu’elles prennent des décisions stratégiques. En cela, l’axiome « Le mieux est l’ennemi du bien » s'applique parfaitement aux KPI. C’est pourquoi, selon Simon Waldron, « L’idéal est de définir 4 KPI par catégorie d’intervenant ».
Personne n'a envie de s’entendre dire que son rapport n’est pas intéressant. Il est totalement contre-productif de générer des rapports que personne ne va lire car ils n’ont pas de valeur ajoutée. Ian Robertson en donne un très bon exemple : « Y a-t-il beaucoup de personnes qui lisent les conditions générales des sites web avant de les accepter ? Et, pour ceux qui en ont le courage, contiennent-elles des informations utiles ou est-ce plutôt une accumulation de jargon juridique ? ». Avant de générer un rapport, il est toujours utile de se demander qui va le lire. Les lecteurs vont-ils comprendre clairement quelles sont les conclusions à en tirer, ou vont-ils avoir l’impression d'avoir perdu leur temps ? Dans le deuxième cas, il y a fort à parier que c’est parce que le rapport est indigeste.
Bien souvent, les équipes de planification disposent de données qui présentent une vraie valeur ajoutée pour l’entreprise. Mais si ces données ne sont pas consultées et suivies d'actions concrètes, ce potentiel sera perdu. Autre citation qui s'applique au reporting WFM : « Vous n'aurez jamais une deuxième chance de faire une bonne première impression. ». Il faut donc veiller à inclure, au début du document, un résumé qui présente le message clé et les informations principales, ainsi que les actions recommandées.
Dans le cadre du WFM, il est important de ne pas sous-estimer l'intelligence du public visé, mais également de ne pas surestimer ses connaissances. Dans cette optique, il faut impérativement utiliser des termes et notions qu’ils comprennent.
D'après Ian Robertson, « Le groupe d'échange sur la gestion des connaissances de The Forum a conclu que les rapports de WFM doivent être rédigés comme s'ils s'adressaient à des enfants de neuf ans.» D'une manière générale, il est préférable de ne pas utiliser plusieurs mots lorsqu’un seul suffit. Il faut également éviter d'employer des termes longs ou compliqués si on peut facilement les remplacer par des mots simples et courants. Il existe aujourd'hui sur internet des sites qui évaluent le niveau de lisibilité d'un texte copié-collé, et fournissent des suggestions d’amélioration si nécessaire. Bien sûr, il ne sera pas toujours possible d’adapter un rapport de WFM au niveau de lecture d’un enfant de 9 ans, mais en le simplifiant on pourra s’en approcher.
Raconter une histoire peut être un moyen de convaincre les autres d'écouter ce que l’on a à dire voire d’adhérer à nos idées. Mais l'une des erreurs les plus fréquentes est de se baser sur la perspective de l'auteur plutôt que du lecteur. On observe malheureusement le même phénomène en entreprise : il arrive fréquemment que les équipes de direction et des opérations ne prennent pas le temps de comprendre les buts et difficultés de l’équipe de planification, mais préfèrent se concentrer sur les objectifs que l’équipe de planification leur permet d'atteindre.
Comme l’explique Ian Robertson, « La seule manière d'attirer l'attention des gens à coup sûr, c’est de s’intéresser à leur histoire. Il faut les impliquer autant que possible. » Il est important de leur montrer comment ils peuvent réussir pour les encourager à agir.
Quelles sont leurs sources de motivation ? Certaines personnes préféreront se concentrer sur la croissance et la réussite, d'autres sur la réduction des risques, d'autres encore sur les techniques de gestion. Ainsi, il y a de grandes chances qu’un gestionnaire de centre de contact s'intéresse surtout au turnover de ses employés, tandis qu’un directeur financier cherchera plutôt à réduire les coûts.
Les logiciels de WFM, les tableurs et les outils de Business Intelligence proposent tous un large éventail de graphiques. Il est facile de se laisser séduire par leur palette de couleurs, d’effets 3D, d’ombres, etc. Mais il faut se rendre à l’évidence : si l'on souhaite transmettre un message de manière claire et succincte, mieux vaut opter pour la simplicité. Un graphique complexe aura probablement l’effet inverse.
Pour illustrer ce phénomène, voici trois graphiques qui présentent exactement les mêmes informations :
Analysons chacun d'entre eux :
Dans certaines situations, il peut toutefois être pertinent d'utiliser des graphiques en camembert. C’est notamment le cas si l'on souhaite mettre en avant des similarités (dans le cas du premier graphique, montrer que le Nord et le Sud ont des valeurs proches). À l’inverse, pour illustrer des différences, même minimes, il est préférable d’utiliser un diagramme en bâtons.
Lorsque l'on fait appel à un graphique, l’échelle choisie peut influencer la perception des lecteurs. Examinons deux graphiques dont l’objectif est de mesurer la précision d’une prévision :
Le premier donne l'impression que la prévision était plutôt précise. On observe quelques déviations, mais le résultat global semble positif. Le deuxième graphique montre, à l'inverse, des différences importantes. En réalité, ces deux diagrammes présentent exactement les mêmes données. En matière de planification, la solution de facilité serait d’opter pour le premier type de graphique afin de convaincre les lecteurs que la prévision est précise, alors que ce n’est absolument pas le cas. Le deuxième type de graphique pourra au contraire être utilisé pour illustrer les faiblesses d'une prévision et proposer une autre approche.
L'objectif des analyses et du reporting WFM est d'améliorer en permanence l’efficacité de la planification afin que l’entreprise puisse atteindre ses objectifs. On apprend plus de ses échecs que de ses succès. Lorsqu’une analyse révèle qu'une action est nécessaire, ce besoin doit être formalisé.
D'après Ian Robertson : « Chaque information que nous communiquons, chaque rapport que nous générons, chaque présentation que nous faisons doit faire l’objet d'un plan d'action. Dans le cas contraire, le travail réalisé pour produire le rapport - ainsi que les efforts des lecteurs pour en prendre connaissance - sont inutiles. »
L'un des objectifs de la planification est d'éviter le gaspillage. Les équipes de planification doivent être aussi rigoureuses lorsqu’elles créent des rapports que pour le reste du cycle de WFM.
Qu’est-ce qu'une « action » ? Une action n'implique pas nécessairement un changement visible. Il peut s'agir d’organiser des recherches pour trouver une solution. Ou de mettre fin à un processus qui n’a aucune valeur ajoutée, qui crée un risque ou qui impacte les performances. Et Ian Robertson de conclure : « Une action n’implique pas forcément un changement. Parfois, il s'agit simplement de continuer à faire la même chose. Lorsqu'on ne sait pas qu'on est sur la bonne voie, on peut avoir envie de s’en écarter. L'action, ça peut aussi tout simplement être de célébrer la réussite ! »
Pour découvrir plus de conseils en matière d'analyse et de reporting WFM, il suffit de regarder notre webinaire vidéo en anglais intitulé Trade secrets every planner should know about WFM reporting & analysis (Analyse et reporting WFM : tout ce que vous devez savoir).